Les Carrières de Chaillot et de Passy en 1810

Du rapport d’Héricart de Thury, ingénieur des mines, inspecteur général des carrières, nous extrayons ce qui concerne Chaillot et Passy.

CHAILLOT : La colline de Chaillot avait été anciennement excavée sur sa pente par des carrières en cavage à bouche et par puits sur son plateau. Les événements arrivés dans la partie sud de Paris et la découverte de plusieurs troupes de contrebandiers qui fraudaient les droits d’octroi de Chaillot par les carrières de l’intérieur et de l’extérieur, déterminèrent d’abord la recherche des excavations, mais les dérangements que les tuyaux des conduits d’eau avaient éprouvés sans cesse par l’effet du tassement des terres délayées et s’écoulant dans les carrières, obligèrent bientôt à poursuivre les travaux d’une manière régulière et avec d’autant plus d’activité que plusieurs fontis très profonds se manifestèrent successivement en plusieurs endroits.

Les carrières de Chaillot ont été exploitées par 5 à 6 mètres de hauteur à piliers tournés. Les excavations sont irrégulières ; souvent elles ont 12, 15 et 20 mètres ou plus de largeur ; les ciels n’ont pas été assez ménagés ; les piliers sont mal répartis et d’autant plus faibles que la masse de pierre est généralement fendue ou coupée de filets, de manière que la plupart des piliers tournés s’affaissent et, s’écrasant sous eux-mêmes, ils entraînent la chute des ciels, la formation des cloches et le percement des fontis.

Les galeries de recherches ont déjà fait communiquer plusieurs grandes carrières isolées et l’état de ruine dans lequel elles ont été trouvées est un motif puissant qui doit déterminer le prolongement de ces recherches avec plus d’activité encore sous toutes les rues présumées excavées. La totalité de la longueur de la voie publique à consolider à Chaillot est de 5 915 mètres, dont 1 034 seulement sont terminés. 1° Toute l’activité a été portée pendant plusieurs années sous les tuyaux, conduits et réservoirs de la pompe à vapeur ; 2° On a été forcé de faire trois escaliers en pierre de taille pour communiquer dans ces carrières ; 3° Les travaux de maçonnerie ont été suspendus pour combler les cloches de l’intérieur et les fontis qui se sont si fréquemment manifestés à la surface ; 4° On s’est en outre attaché à percer 424 mètres de galerie de reconnaissance entre les différentes carrières isolées. L’établissement de la pompe à vapeur et celui de Sainte-Périne – alors à Chaillot – exigeront encore des recherches et des travaux qu’on ne saurait trop activer, les carrières qui les avoisinent ayant généralement besoin de consolidation.

PASSY : La découverte des carrières de Passy est encore récente ; aussi la consolidation en est-elle peu avancée. Plusieurs fontis et des terrassements dans les rues de la Tour, de Passy et de la Voie-Basse, y ont déterminé : 1° La construction d’un escalier de carrière ; 2° L’ouverture d’un trou de service et le percement de différentes tranches ou galeries de recherches. Plusieurs carrières isolées ont été reconnues par les caves de quelques maisons de Passy et ont fait activer le percement de galeries pour y porter de suite les ateliers nécessaires, mais l’exiguïté de fond a forcé d’y ralentir la marche des travaux, et il serait cependant urgent de les reprendre sans délai.

La totalité de la voie publique jusqu’à ce jour reconnue devoir être consolidée est de 4 600 mètres, dont on n’a encore pu en terminer que 176, outre 120 mètres de percement de galeries de recherches.

L’atelier de cette section a toujours été très faible. Sa situation dans un faubourg extérieur n’est pas une raison pour le négliger, et je pense même, au contraire, qu’on devrait y consacrer des fonds plus considérables ou même extraordinaires, 1° Parce que le bourg de Passy est situé à l’entrée et sur une des avenues du bois de Boulogne, vers lequel il y a constamment pendant l’été un grand nombre de voitures et de gens qui s’y rendent à pied ou à cheval ; 2° Toutes les grosses voitures de roulage auxquelles il n’est pas permis de circuler dans l’intérieur de Paris sont forcées, pour aller rejoindre le boulevard extérieur, de monter la rue Basse qui est située sur des excavations pour la plupart menacées d’une ruine prochaine, les ciels n’ayant aucune solidité et les piliers tournés en étant presque généralement trop faibles ou écrasés.

GABRIEL VAUTHIER

 

 

Article publié dans le Bulletin de la Société Historique d’Auteuil et de Passy, tome XI, n° 110, page 111.
L’article est consultable en ligne sur le site Gallica. La page 111 équivaut sur Gallica à la page 235 >>>